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mille, corbeilles d’argent. Et au milieu, il y avait un grand rond planté de pensées.

— Là, là ! dit-elle en désignant ce rond de son bras tendu, là, regardez bien… vous voyez ?… des lettres…

En effet, peu à peu, Patrice se rendait compte que les touffes de pensées étaient disposées de manière à inscrire sur le sol quelques lettres qui se détachaient parmi d’autres touffes de fleurs. Cela n’apparaissait pas du premier coup. Il fallait un certain temps pour voir, mais, quand on avait vu, les lettres s’assemblaient d’elles-mêmes et formaient sur une même ligne, trois mots : Patrice et Coralie.

— Ah ! dit-il à voix basse, je vous comprends !…

C’était si étrange, en effet, et si émouvant de lire leurs deux noms, qu’une main amie avait pour ainsi dire semés, leurs deux noms réunis en fleurs de pensées ! C’était si étrange et si émouvant de se retrouver toujours ainsi l’un et l’autre, liés par des volontés mystérieuses, liés maintenant par l’effort laborieux des petites fleurs qui surgissent, s’éveillent à la vie, et s’épanouissent dans un ordre déterminé !

Coralie se redressa et dit :

— C’est le vieux Siméon qui s’occupe du jardin.

— Évidemment, dit-il d’un air un peu ébranlé, cela ne change certes pas mon idée. Notre ami inconnu est mort, mais Siméon a pu le connaître, lui. Siméon était peut-être de connivence avec lui sur certains points, et il doit en savoir long. Ah ! s’il pouvait parler et nous mettre dans la bonne voie.

Une heure plus tard, comme le soleil pen-