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Mary remontait. Avec mille précautions, elle fit à Max Lamar un pansement provisoire après avoir soigneusement lavé sa blessure. Celle-ci ne paraissait pas grave. La balle avait pénétré entre le pouce et l’index et n’avait touché aucun muscle essentiel.

Florence, bouleversée, retenait ses larmes avec peine. Elle avait craint que Max n’eût été tué, et cette simple pensée l’affolait de douleur et de remords, car n’eût-ce pas été un peu de sa faute ?… N’aurait-elle pas dû, au risque de se perdre, mettre Lamar au courant de la présence du bandit ? Et, en réfléchissant, une stupeur saisit la jeune fille. Comment n’avait-elle pas plus tôt essayé de porter secours à Max Lamar ? Comment n’avait-elle pas trouvé le courage de l’assister dans sa lutte contre le bandit ? Pourquoi était-elle restée ainsi inactive, léthargique, terrifiée, alors que celui qu’elle aimait jouait sa vie pour la défendre ? Où était cette intrépidité qui dans des situations infiniment moins graves s’était manifestée en elle ?…

Mais un incident coupa court aux réflexions intimes de la jeune fille. Les policemen, que Mme Travis avait demandés par téléphone, arrivaient.

Max Lamar leur montra Sam Smiling toujours étendu évanoui sur le plancher.

— Voilà l’homme que l’on recherche depuis quelques jours, leur dit-il. Emportez-le à l’hôpital, mais, bien que je le croie sérieusement blessé, surveillez-le sans relâche. Le coquin a la vie dure et il est capable de toutes les ruses…

Et Lamar ajouta :

— Vous direz à M. Randolph Allen qu’il n’ait à mon égard aucune crainte. Ma blessure est insignifiante.

Les deux policemen chargèrent Sam Smiling sur un brancard et l’emportèrent.

Alors se tournant vers Florence, Max Lamar lui dit d’une voix grave :

— Mademoiselle Travis, il faut maintenant que je vous pose quelques questions. Et pour cela je désire que nous soyons seuls.

Florence répondit, avec un sourire un peu forcé :

— Comme vous voudrez, docteur. Préférez-vous descendre au petit salon ? Le pourrez-vous ?

Sa voix tremblait un peu, malgré ses efforts. Elle comprenait que, dans quelques minutes, tout allait se dénouer implacablement. C’était le moment de la révélation redoutable qui la faisait défaillir de honte, malgré tous les raisonnements par quoi elle avait essayé pour elle-même d’en pallier l’horreur.

Elle appela Mme Travis et Mary, et toutes les trois aidèrent Max Lamar à descendre.

En passant devant sa chambre, Florence y pénétra, après avoir dit au blessé :

— Je vous rejoins dans cinq minutes, docteur. Le temps de changer de toilette.

Une fois seule, elle ne put retenir les larmes qui l’étouffaient ; mais bientôt elle se domina, elle ne voulait pas, au moins, paraître lâche.

Rapidement, la jeune fille revêtit une robe gris clair, dont le corsage en soie souple, largement échancré, était garni de dentelles à l’encolure et formait casaque par-dessus la jupe. Celle-ci, très ample, retombait en tunique au-dessus d’une autre jupe de même étoffe que le corsage.

Suprême coquetterie ! Elle voulait être belle au moment où tout son rêve allait s’écrouler. Elle voulait être belle encore une fois pour celui qu’elle aimait, même s’il devait à jamais se détourner d’elle !

Elle descendit, et, dans le petit salon, elle trouva Max Lamar assis dans une bergère et entouré de Mary et de Mme Travis, qui lui donnaient leurs soins.

En apercevant Florence, il releva péni-