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disent les enfants, vous ne « brûlez » pas du tout. Ah ! mais pas du tout ! Et c’est si facile ! Dois-je vous aider ? À côté de vous, chère amie, sur ce petit guéridon… Que diable, il n’y a pourtant pas grand’chose sur ce guéridon ! De quoi lire, de quoi écrire, de quoi fumer, de quoi manger, et c’est tout… Voulez-vous un de ces fruits confits ? Sans doute vous réservez-vous pour le repas plus substantiel que j’ai commandé ?

Clarisse ne répondit point. Elle semblait ne pas même écouter ce qu’il disait, comme si elle eût attendu les autres paroles, plus graves celle-là, qu’il ne pouvait manquer de prononcer.

Il débarrassa le guéridon de tous les objets qui l’encombraient, et les mit sur la cheminée. Puis il sonna.

Un maître d’hôtel vint.

Il lui dit :

— Le déjeuner que j’ai commandé est prêt ?

— Oui, monsieur.

— Il y a deux couverts, n’est-ce pas ?

— Oui, monsieur.

— Et du champagne ?

— Oui, monsieur.

— De l’extra-dry ?

— Oui, monsieur.

Un autre domestique apporta un plateau et disposa en effet, sur le guéridon, deux couverts, un déjeuner froid, des fruits, et, dans un seau de glace, une bouteille de champagne.

Puis les deux domestiques se retirèrent.

— À table, chère madame. Comme vous le voyez, j’avais pensé à vous, et votre couvert était mis.

Et, sans paraître remarquer que Clarisse ne semblait nullement prête à faire honneur à son invitation, il s’assit et commença de manger, tout en continuant :

— Ma foi oui, j’espérais bien que vous finiriez pas me consentir à ce tête-à-tête.