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dait l’eau frémissante de l’étang. À plusieurs reprises, il essaya de lui poser des questions. Elle se dérobait aussitôt, tremblante, épouvantée par tout ce qui pouvait être allusion aux heures affreuses de Beaucourt. Elle causait pourtant davantage, mais des choses de son passé lointain, de la vie qu’elle menait jadis à Sainte-Marie, et de la paix qu’elle retrouvait encore dans cette atmosphère affectueuse et sereine.

Une fois, sa main étant posée à l’envers sur le socle du vase, il se pencha, et, sans y toucher, en examina les lignes.

— C’est bien ce que j’ai deviné dès le premier jour… Une double destinée, l’une sombre et tragique, l’autre heureuse et toute simple. Elles se croisent, s’enchevêtrent, se confondent, et il n’est pas possible encore de dire qui l’emportera. Quelle est la vraie, quelle est celle qui correspond à votre véritable nature ?

— La destinée heureuse, dit-elle. Il y a en moi quelque chose qui remonte vite à la surface, et qui me donne, comme ici, la gaieté et l’oubli quels que soient les périls.

Il continua son examen.

— Méfiez-vous de l’eau, dit-il en riant. L’eau peut vous être funeste. Naufrages, inondations… Que de périls ! Mais ils s’éloignent… Oui, tout s’arrange dans votre vie. Déjà la bonne fée l’emporte sur la mauvaise.

Il mentait pour la tranquilliser et avec le désir constant que, sur sa jolie bouche, qu’il osait à peine