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Aussitôt Raoul s’écria :

— Mais c’est cela qu’il faudrait apprendre à Clara !

Tout d’abord, la tranquilliser sur le point qui est certainement pour elle la pire catastrophe et la cause de son déséquilibre. Au besoin inventer les nouvelles les plus favorables…

À trois heures de l’après-midi, Raoul eut un rendez-vous clandestin avec un commis des bureaux de la police judiciaire qu’il connaissait depuis longtemps, et dont il sut activer l’obligeance. Celui-ci consentit à transmettre un billet par l’intermédiaire d’une employée à qui son service permettait d’approcher la captive.

D’autre part, il obtenait sur Gorgeret et sur son ménage les indications nécessaires.

À six heures, n’ayant plus entendu parler de son émissaire à la police judiciaire, il entrait dans le dancing du quartier Saint-Antoine, et, aussitôt, identifiait, d’après le signalement qu’on lui avait donné, la séduisante Mme Gorgeret, à qui il faisait la cour, sans se nommer bien entendu.

Une heure plus tard, accueilli avec bonne grâce, il emprisonnait la trop confiante Zozotte chez son ami de l’île Saint-Louis. Et à neuf heures et demie, Gorgeret, attiré dans le piège, le rejoignait au dancing Saint-Antoine.

Donc, à ce moment, tout semblait réussir au gré de Raoul. Et, pourtant, de cet entretien avec Gorgeret, il conservait une impression pénible. Sa victoire du début se résolvait, somme toute, en un dénouement qui se déroulait en dehors de lui et de son contrôle. Il avait tenu Gorgeret entre ses mains et l’avait laissé partir, se fiant à lui, et sans pouvoir vérifier ce que l’inspecteur ferait ou ne ferait pas. Car enfin, comment s’assurer que Clara serait avertie ? La parole de Gorgeret ? Mais si Gorgeret estimait que cette parole lui avait été extorquée, et que l’acte