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Raoul riait tout en l’embrassant et en répétant à chaque baiser :

— Clara… Clara la douce… Clara la triste… Clara l’énigmatique…

Elle prononça, en hochant la tête :

— Oui, tu m’aimes… mais tu viens de le dire, tu es un inconstant… Mon Dieu, comme je souffrirai par toi !

— Mais comme tu seras heureuse ! dit-il gaiement. Et puis, je ne suis pas si infidèle que tu le crois. T’ai-je jamais trompée ?

À son tour, elle se mit à rire.

Durant une semaine, le public et les journaux s’occupèrent du Casino Bleu. Puis, devant l’inanité des recherches et l’effondrement successif de toutes les hypothèses, il n’en fut plus question. Gorgeret d’ailleurs se refusait à toute interview. Les reporters ne découvrirent aucune piste.

Moins soucieuse, Clara sortait sur la fin de l’après-midi, faisant quelques courses dans les magasins des quartiers extérieurs, ou se promenant au Bois. Raoul choisissait également cette heure pour aller à ses rendez-vous et ne l’accompagnait pas, de crainte d’attirer l’attention.

De temps à autre, il passait sur le quai Voltaire, en vue du numéro 63, soupçonnant que le grand Paul devait rôder de ce côté, et que la police y tendrait quelque piège, à l’occasion.

Il ne releva rien de suspect et, désormais, chargea Courville de se tenir à l’affût, en feuilletant les livres dans les étalages des bouquinistes établis sur les parapets. Mais, un jour — c’était le quinzième après l’enlèvement de Clara, — étant revenu lui-même, il aperçut, d’assez loin, Clara qui sortait du numéro 63, montait dans un taxi et s’éloignait dans la direction opposée.

Raoul ne tenta pas de la suivre. Il fit signe à Courville, qui le rejoignit, et il l’envoya aux renseignements près de la concierge. Courville revint au bout de quelques minutes et lui annonça que le marquis n’était