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pelouse devant la façade principale et qui menait au rond-point du Dolmen-aux-Fées, s’embarrassaient dans les ronces et dans les branches de lierre.

« Halte ! commanda Vorski. Soufflez un peu, mes gaillards. Otto, passe-moi la gourde. J’ai le cœur qui chavire. »

Il but à longs traits.

« À ton tour, Otto… Comment, tu refuses ? Qu’y a-t-il donc ?

— Je pense qu’il y a des gens dans l’île, qui sûrement nous cherchent.

— Qu’ils continuent donc à nous chercher !

— Et s’ils viennent en bateau, et qu’ils montent ce sentier de la falaise, par où la femme et l’enfant voulaient s’enfuir ce matin, et que nous avons trouvé ?

— Nous avons à craindre une attaque par terre et non par mer. Or, la passerelle est brûlée. Plus de communication.

— À moins qu’ils ne découvrent l’entrée des cellules, aux Landes-Noires, et qu’ils suivent le tunnel jusqu’ici ?

— L’ont-ils découverte, cette entrée ?

— Je n’en sais rien.

— Eh bien, en admettant qu’ils la découvrent, n’avons-nous pas, depuis tantôt, bouché l’issue de ce côté, démoli l’escalier, mis tout sens dessus dessous ? Pour déboucher, il leur faudrait bien une bonne demi-journée. Or, à minuit, tout sera fini, et, au petit jour, nous serons loin de Sarek.

— Ce sera fini… ce sera fini… c’est-à-dire que nous aurons un crime de plus sur la conscience. Mais…

— Mais, quoi ?

— Le trésor ?

— Ah ! le trésor, voilà le grand mot lâché, le trésor, c’est ça qui te taquine, n’est-ce pas, brigand ? Eh bien, rassure-toi, c’est comme si tu avais dans ta poche la part qui te revient.

— Vous en êtes sûr ?

— Si j’en suis sûr ! Crois-tu donc que c’est de gaîté de cœur que je reste ici et que j’accomplis toute cette sale besogne ? »