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gnée de fer et tira vers elle. La main disparut, mais l’effort adverse continua. Il devait y avoir aussi une poignée de l’autre côté.

Tout de suite un coup de sifflet retentit. La femme demandait du secours. Et, presque en même temps, dans le couloir, à quelque distance de la femme, un cri :

« Maman ! maman ! »

Ah ! ce cri, avec quelle émotion profonde Véronique l’entendit ! Son fils, son vrai fils l’appelait, son fils encore prisonnier, mais vivant ! quelle joie surhumaine !

« Me voici, mon petit.

— Vite, maman, ils m’ont attaché, et le sifflet, c’est leur signal… on va venir.

— Me voici… je te sauverai avant !… »

Elle ne doutait pas du dénouement. Il lui semblait que ses forces n’avaient pas de bornes et que rien ne pourrait résister à la tension exaltée de tout son être. De fait, l’adversaire faiblissait, abandonnait peu à peu du terrain.

L’ouverture devenait plus grande, et subitement la lutte fut terminée. Véronique passa.

La femme avait fui déjà dans le couloir et tirait l’enfant par une corde, pour le contraindre à marcher malgré les liens qui l’attachaient. Vaine tentative ! Elle y renonça aussitôt. Véronique était près d’elle, le revolver au poing.

La femme lâcha l’enfant et se redressa dans la clarté qui provenait des cellules ouvertes. Elle était vêtue de laine blanche, avec une cordelière autour de la taille, les bras à demi nus, le visage encore jeune, mais flétri, maigre et ridé. Sa chevelure était blonde, coupée de mèches blanches. Ses yeux brillaient de fureur haineuse. Les deux femmes se regardaient, sans un mot, comme deux ennemis qui se sont mesurés et entre lesquels la bataille recommencera. Triomphante, Véronique souriait presque, d’un sourire de défi. À la fin, elle dit :

« Si vous touchez du bout du doigt mon enfant, je vous tue. Partez. »

La femme n’avait pas peur. Elle semblait réfléchir, et prêtait l’oreille dans l’attente d’un secours. Rien ne