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L’ÉCLAT D’OBUS
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qui, depuis un mois, sans être gênées d’ailleurs par les quelques soldats du landsturm auxquels fut confiée la garde de Corvigny, ont poursuivi une enquête minutieuse sur tous ces problèmes, et qui n’ont même pas pu établir une hypothèse plausible. Une seule certitude : l’affaire fut préparée de longue date et dans ses moindres détails. Les forts, les coupoles, l’église, la place, avaient été exactement repérés, et les canons de siège disposés d’avance et rigoureusement pointés de façon que les onze obus pussent atteindre les onze objectifs que l’on avait résolu d’atteindre. Voilà. Pour le reste, mystère.

— Et le château d’Ornequin ? Et Élisabeth ?

Paul s’était levé. Les clairons sonnaient l’appel du matin. La canonnade redoublait d’intensité. Ils se dirigèrent tous deux vers la place, et Paul continua :

— Là aussi le mystère est effarant, et peut-être davantage encore. Une des routes transversales qui coupent la plaine entre Corvigny et Ornequin a été désignée par l’ennemi comme une limite que personne, ici, n’a eu le droit de franchir sous peine de mort.

— Donc, pour Élisabeth ?… dit Bernard.

— Je ne sais pas, je ne sais rien de plus. Et c’est terrible, cette ombre de mort qui s’étend sur toutes les choses et sur tous les événements. Il paraît — je n’ai pas pu contrôler la provenance de ce bruit — que le village d’Ornequin, situé près du château, n’existe même plus. Il a été entièrement détruit, mieux que cela, supprimé, et ses quatre cents habitants emmenés en captivité. Et alors…

Paul baissa la voix et dit en frissonnant :

— Et alors qu’ont-ils fait au château ? On le