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L’ÉCLAT D’OBUS

histoire devait lui paraître d’une importance médiocre. Elle attendait qu’il fût question d’elle.

Paul continua :

— Vous avez hérité de votre père deux sentiments qui dominent toute votre vie, un amour effréné pour cette dynastie de Hohenzollern à qui il semble que le hasard d’un caprice impérial, ou plutôt royal, ait rattaché votre père, et une haine féroce, sauvage contre cette France à laquelle il regrettait de ne pas avoir fait assez de mal. L’amour de la dynastie, vous l’avez concentré tout entier, aussitôt femme, sur celui qui la représente actuellement, et, cela, à un tel point qu’après avoir eu l’espoir invraisemblable de monter sur le trône, vous lui avez tout pardonné, même son mariage, même son ingratitude, pour vous dévouer à lui, corps et âme. Mariée par lui à un prince autrichien qui mourut on ne sait pas comment, puis à un prince russe qui mourut on ne sait pas non plus comment, partout vous avez travaillé pour l’unique grandeur de votre idole. Au moment où la guerre entre l’Angleterre et le Transvaal fut déclarée, vous étiez au Transvaal. Au moment de la guerre russo-japonaise, vous étiez au Japon. Vous étiez partout, à Vienne lorsque le prince Rodolphe fut assassiné ; à Belgrade lorsque le roi Alexandre et la reine Draga furent assassinés. Mais je n’insisterai pas davantage sur votre rôle… diplomatique. J’ai hâte d’arriver à votre œuvre de prédilection, celle que vous avez poursuivie depuis vingt ans contre la France.

Une expression méchante, presque heureuse, contracta le visage de la comtesse Hermine. Vraiment oui, c’était son œuvre de prédi-