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L’ÉCLAT D’OBUS

pas trop surpris, mon cher camarade. Voilà seize ou dix-sept ans, à ma connaissance, qu’il est commencé. En outre, comme je vous l’ai dit, une partie de l’ouvrage était faite, puisque nous nous trouvons dans les salles inférieures des anciennes constructions d’Ornequin et qu’il a suffi de les retrouver et de les arranger selon le but auquel on le destinait. Il y a quelque chose de bien plus colossal.

— Qui est ?

— Qui est le tunnel qu’il leur a fallu construire pour amener ici leurs deux pièces.

— Un tunnel ?

— Dame ! par où voulez-vous qu’elles soient venues ? Suivons les rails en sens inverse et nous allons y arriver.

De fait, un peu en arrière, les deux voies ferrées se rejoignaient et ils aperçurent l’orifice béant d’un tunnel, large de deux mètres cinquante environ et d’une hauteur égale. Il s’enfonçait sous terre, en pente très douce. Les parois étaient en briques. Aucune humidité ne suintait des murs et le sol lui-même était absolument sec.

— Ligne d’Ébrecourt, dit Paul en riant. Onze kilomètres à l’abri du soleil. Et voilà comment fut escamotée la place forte de Corvigny. Tout d’abord quelques milliers d’hommes ont passé, qui ont égorgé la petite garnison d’Ornequin et les postes de la frontière, puis qui ont continué leur chemin vers la ville. En même temps les deux canons monstrueux étaient amenés, montés et pointés sur des emplacements repérés d’avance. Leur besogne accomplie, ils s’en allaient et l’on rebouchait les trous. Tout cela n’avait pas duré deux heures.