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L’ÉCLAT D’OBUS
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Paul murmura :

— Je n’en doute pas, et je ne doute pas non plus qu’il ne veuille mettre à exécution ses menaces contre Élisabeth.

— Bah ! Nous avons quarante-huit heures, puisqu’il donnait à son complice Karl, le 10 janvier comme date de son arrivée, et qu’il ne doit agir que deux jours après.

— Et s’il agit dès aujourd’hui ? objecta Paul d’une voix altérée.

Malgré son angoisse, cependant, le trajet lui sembla rapide. Il se rapprochait enfin, d’une façon réelle cette fois, du but dont chaque jour l’éloignait depuis quatre mois. Ornequin, c’était la frontière, et à quelques pas de la frontière se trouvait Ébrecourt. Les obstacles qui s’opposeraient à lui avant qu’il n’atteignît Ébrecourt, avant qu’il ne découvrît la retraite d’Élisabeth, et qu’il ne pût sauver sa femme, il n’y voulait pas songer. Il vivait. Élisabeth vivait. Entre elle et lui il n’y avait point d’obstacles.

Le château d’Ornequin, ou plutôt ce qui en restait — car les ruines mêmes du château avaient subi en novembre un nouveau bombardement — servait de cantonnement à des troupes territoriales, dont les tranchées de première ligne longeaient la frontière.

On se battait peu de ce côté, les adversaires, pour des raisons de tactique, n’ayant pas avantage à se porter trop en avant. Les défenses s’équivalaient, et de part et d’autre, la surveillance était très active.

Tels furent les renseignements que Paul obtint du lieutenant de territoriale avec lequel il déjeuna.