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L’ÉCLAT D’OBUS

pas longtemps… quelques secondes… mais tout de même assez pour voir deux choses…

— Dépêche-toi.

— D’abord les feuilles volantes de ce manuscrit dont vous avez brûlé par précaution les pages les plus importantes, mais dont malheureusement vous avez égaré toute une partie.

— Le journal de sa femme ?

— Oui.

Le major lâcha un juron.

— Que je sois damné ! On brûle tout, dans ces cas-là ! Ah ! si je n’avais pas eu cette curiosité stupide !… Et après ?

— Après, Excellence ? Oh ! presque rien, un fragment d’obus, oui, un petit fragment d’obus, mais qui m’a bien eu l’air d’être l’éclat que vous m’avez ordonné d’enfoncer dans le mur du pavillon, après y avoir plaqué des cheveux d’Élisabeth. Qu’en pensez-vous, Excellence ?

Le major frappa du pied avec colère et lança une nouvelle bordée de jurons et d’anathèmes sur la tête de Paul Delroze.

— Qu’en pensez-vous, Excellence ? répéta l’espion.

— Tu as raison, s’écria-t-il. Par le journal de sa femme, ce satané Français peut entrevoir la vérité, et ce morceau d’obus en sa possession, c’est la preuve que, pour lui, sa femme vit peut-être encore, et c’est cela que je voulais éviter. Sans quoi nous l’aurons toujours sur le dos.

Sa fureur s’exaspérait.

— Ah ! Karl, il m’embête, celui-là. Lui et son gamin de beau-frère, quels sacripants ! Par Dieu, je croyais bien que tu m’en avais débarrassé le soir où nous sommes revenus au château dans leur chambre et où nous avons vu