Page:Leblanc - L’Éclat d’obus, 1916.djvu/171

Cette page a été validée par deux contributeurs.
L’ÉCLAT D’OBUS
163

le major, complétant l’oraison funèbre. Reprends-lui son portefeuille, Karl. Il le mettait dans une poche intérieure de son gilet de laine.

L’espion se baissa et dit au bout d’un instant :

— Il n’y est pas, Excellence.

— C’est qu’il l’a changé de place. Regarde dans les autres poches.

— Pas davantage, affirma Karl, après avoir obéi.

— Comment ? Celle-là est raide ! Rosenthal ne se séparait jamais de son portefeuille. Il le gardait sur lui pour dormir. Il l’aura gardé pour mourir.

— Cherchez vous-même, Excellence.

— Mais alors ?

— Alors quelqu’un est venu ici depuis tantôt et a pris le portefeuille.

— Qui ? Des Français ?

L’espion se releva, demeura silencieux un moment, et, s’approchant du major, lui dit d’une voix lente :

— Des Français, non, Excellence ; mais un Français.

— Que veux-tu dire ?

— Excellence, Delroze est parti tantôt en reconnaissance avec son beau-frère Bernard d’Andeville. De quel côté ? Je n’ai pu le savoir. Je le sais maintenant. Il est venu par ici. Il a exploré les ruines du phare et, voyant des morts, il a retourné les poches.

— Mauvaise affaire, bougonna le major. Tu es sûr ?

— Certain. Il devait être là, il y a une heure au plus. Peut-être même, ajouta Karl en riant, peut-être y est-il encore, caché dans quelque trou…