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L’ÉCLAT D’OBUS

Et, de nouveau, l’apaisement. Rien ne bougeait plus dans l’espace. Il semblait que les herbes des marécages devenaient immobiles. Pourtant Bernard et Paul pressentaient la progression lente des volontaires d’Afrique partis en même temps qu’eux, leurs longues haltes au milieu des eaux glacées, leurs efforts tenaces.

— De plus en plus lugubre, gémit Bernard.

— Ce que tu es impressionnable, ce soir ! observa Paul.

— C’est l’Yser. Yser, misère, disent les Boches.

Ils se couchèrent vivement. L’ennemi balayait le chemin avec des réflecteurs et sondait aussi les marais. Ils eurent encore deux alertes, et enfin atteignirent sans encombre les abords du vieux phare.

Il était onze heures et demie. Avec d’infinies précautions ils se glissèrent parmi des blocs démolis et purent bientôt se rendre compte que le poste était abandonné. Cependant, sous les marches écroulées de l’escalier, ils découvrirent une trappe ouverte et une échelle qui s’enfonçait dans une cave où brillaient des lueurs de sabres et de casques. Mais Bernard, qui d’en haut, fouillait l’ombre avec une lampe électrique, déclara :

— Rien à craindre, ce sont des morts. Les Boches les auront jetés là, après la canonnade de tantôt.

— Oui, dit Paul. Aussi faut-il prévoir le cas où ils viendraient les rechercher. Monte la garde du côté de l’Yser, Bernard.

— Et si l’un de ces bougres-là vit encore ?

— Je vais descendre.