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L’ÉCLAT D’OBUS

pendait le long du mur, attachée aux trois anneaux de fer, et Paul revit, avec un frémissement d’épouvante, les traces des balles, et le petit éclat d’obus qui retenait dans le plâtre les cheveux d’Élisabeth.

Un obus français ! Cela ajoutait encore de l’horreur à l’atrocité du meurtre.

Ainsi donc, la veille, lorsque lui, Paul, par la capture de l’automobile blindée et par son raid audacieux jusqu’à Corvigny, il avait ouvert la route aux troupes françaises, il déterminait les événements qui aboutissaient au meurtre de sa femme ! L’ennemi se vengeait de sa reculade en fusillant les habitants du château ! Élisabeth, collée au mur, rivée à une chaîne, était criblée de balles ! Et, par une ironie affreuse, son cadavre recevait encore les éclats des premiers obus que les canons français avaient tirés avant la nuit, du haut des collines avoisinant Corvigny.

Paul enleva le fragment d’obus et détacha les boucles d’or qu’il recueillit précieusement. Ensuite, avec Bernard, il entra dans le pavillon où déjà les infirmiers avaient installé une ambulance provisoire. Il trouva l’oberleutnant étendu sur une couche de paille, bien soigné, et en état de répondre aux questions.

Tout de suite un point se précisa, de façon très nette, c’est que les troupes allemandes qui avaient tenu garnison au château d’Ornequin n’avaient eu, pour ainsi dire, aucun contact avec celles qui, la veille, s’étaient repliées en avant de Corvigny et des forts contigus. Comme si l’on eût peur qu’une indiscrétion fût commise relativement à ce qui s’était passé pendant l’occupation du château, la garnison avait été