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L’ÉCLAT D’OBUS
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automobile, bondée de soldats allemands, débouchait. Était-ce des renforts ? Non. L’automobile tourna presque sur place, et, entre elle et les derniers combattants du petit bois, il y avait, debout, en grand manteau gris, un officier qui, le revolver au poing, les exhortait à la résistance, tout en opérant sa retraite vers la voiture envoyée à son secours.

— Regarde, Paul, regarde, répéta Bernard.

Paul fut stupéfait. Cet officier que Bernard signalait à son attention, c’était… Mais non, la chose ne pouvait être admise. Et pourtant…

Il demanda :

— Qu’est-ce que tu veux dire, Bernard ?

— Le même visage, murmura Bernard, le même visage que celui d’hier, tu sais, Paul, le visage de cette femme qui m’interrogeait hier soir, sur toi, Paul.

Et Paul, de son côté, reconnaissait, sans hésitation possible, l’être mystérieux qui avait tenté de le tuer près de la petite porte du parc, l’être qui offrait une si inconcevable ressemblance avec la meurtrière de son père, avec la femme du portrait, avec Hermine d’Andeville, avec la mère d’Élisabeth et la mère de Bernard.

Bernard épaula son fusil.

— Non, ne tire pas ! cria Paul effrayé d’un tel geste.

— Pourquoi ?

— Tâchons de le prendre vivant.

Il s’élança soulevé de haine, mais l’officier avait couru jusqu’à la voiture. Les soldats allemands lui tendaient déjà la main et le hissaient parmi eux. D’un coup de feu, Paul atteignit celui qui se trouvait au volant. L’officier