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Maté, il n’en conçut que plus de rancune. Sournoisement il plia. Mais le besoin de vengeance fut un nouveau mobile parmi ceux qui le poussaient au mal.

Un matin, M. Hélienne l’appela :

— J’ai réfléchi, le froid redouble, va commander du bois au village.

Ce revirement étonna Marc. On eût dit que son père souhaitait de l’éloigner. Il partit, fit un détour et se cacha sur la colline. Une heure après, il aperçut un homme qui s’arrêtait devant la grille. Il reconnut Me Pichard, le notaire. Un pressentiment ramena Marc. Il franchit la haie derrière la maison, se glissa jusqu’à l’entrée, monta l’escalier à pas furtifs et tendit l’oreille. La porte était mince. Il saisit cette phrase.

— C’est bien, Me Pichard, puisque vous me le dites, je vendrai mes propriétés. Ce sera un peu long. D’ici là, nous recauserons de la manière dont sera rédigé le testament. Encore une fois, ce n’est pas que je veuille du mal à mon fils, mais on n’a jamais sympathisé. En outre, j’ai en Champagne de vieilles parentes dans le besoin, et je veux leur laisser ce que je pourrai…

Et il ajouta nettement :

— … si c’est possible, même, ma fortune tout entière.

Marc gagna sa chambre. Il ne pensait à rien. Une tranquillité soudaine le rassérénait. Il éprouvait l’assurance du passager quand la mer s’aplanit après le soulèvement des tempêtes.

Le notaire s’en alla. M. Hélienne lui dit :

— Je vous reconduis au bout du chemin.

Marc patienta jusqu’à ce qu’ils eussent quitté la maison, prit un petit pa-