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tant le charme du lieu l’enveloppait. Il y assistait au réveil progressif de son intelligence que sollicitaient l’étude des architectures et le mystère des humanités qui s’élaborent.

Il s’endormit durant un mois en cette béatitude, sorte de réaction, comme il le comprit plus tard, répit bienfaisant que lui valaient l’extrême courbature de tout son être et son adresse à fuir certaines idées. Mais les maîtres revinrent et, eux présents, on interdisait l’entrée du parc. Il s’en irrita. Où retrouverait-il les rêveries substantielles que lui inspiraient le château séculaire et la légende des eaux défuntes ? À la recherche d’un site équivalent, il vagua d’un bout à l’autre de son domaine, se plaignit de son exiguïté et rentra, maussade, inquiet.

Ce mécontentement persista. Des choses le fortifiaient, la rencontre fréquente des châtelains, le passage d’étrangers, baigneurs du Havre ou d’Étretat traversant en cavalcades la vallée du Bec. Il refusait de s’avouer le rapport qui reliait la vue de ces oisifs et la réapparition chez lui de pensées équivoques. Mais ces pensées, il ne les pouvait nier. Sans haine contre les autres, plus riches et mieux armés, il s’insurgeait contre son existence étroite, âpre, sombre, mesquine.

Tout l’y importunait, ses bottes grossières, son pantalon effiloqué, la dureté du pain, la minceur des matelas, le manque de rideaux, de bougies, de linge. Serait-il donc toujours loqueteux et misérable ? Une nuit d’insomnie, il s’écria :

— Pourtant ce n’est pas la fin. Je ne puis moisir jusqu’à ma mort dans cette prison.

Ce mot, en lui rappelant l’horrible