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— Que veux-tu de moi ?

Marc était si désolé qu’il se fit suppliant :

— Je n’exige rien. La lutte ne m’a pas réussi, je suis vaincu, je te demande asile.

M. Hélienne le scruta d’un air soupçonneux. Puis, sans répondre directement, il lui montra d’un geste circulaire le jardin et la maison :

— Cela n’est pas grand, hein ? Quelques centaines de mètres où je cultive mes choux et une masure où j’ai du mal à me préserver du vent et de la pluie.

Ils entrèrent. Du doigt, le bonhomme désignait les plafonds lézardés, les murs moisis, le délabrement et la poussière des meubles. Enfin, ouvrant une mansarde, il dit :

— Ta chambre serait ici, les légumes du jardin seraient le fond de ta nourriture. Pour tout domestique, j’ai une bonne femme du pays qui fait la cuisine. Je n’ai pas voulu te prendre en traître. Cela te va-t-il ?

Résolument Marc déclara :

— Je ne désire rien d’autre.

Le lendemain, il ouvrit sa croisée de bonne heure. Paisiblement pénétra l’air frais et vif d’une matinée d’août. Il s’en baigna la gorge et les poumons. Et ce fut d’une telle saveur qu’il eut hâte de se mouvoir dans cette pureté.

Se penchant, il s’orienta d’abord. Quelques chaumières entouraient la maison, formant avec elles le hameau de Saint-Martin-du-Bec. Le long du jardin passait la grand’route. En face, très proches, ondulaient les collines. À leur pied, une brume blanche flottait mobile, irrégulière.