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me déclare contente. Je le serais tout à fait si tu assistais à mon mariage. N’est-ce pas possible ?… »

Marc dit :

— Évidemment, c’est possible.

On partit de bonne heure, en juin. L’habitation se trouvait à trois kilomètres de Pornic. On la nommait le Prieuré. Elle faisait jadis partie d’un monastère dont les vestiges s’éparpillaient assez loin parmi les haies et les ronces. Une rivière traversait les vergers.

Hélienne n’aima pas le pays. Ce sont de grandes plaines monotones, à ondulations lentes. L’horizon est court. Des arbres le restreignent. On se croirait toujours à la lisière d’un bois où l’on n’entrerait jamais, car, entre ces rangées d’arbres, s’étend le vide de petits carrés de blé et de maïs. Cela manque à la fois d’étendue et d’intimité.

Les Altier déjeunaient le lendemain. Le père et la mère arrivèrent en voiture. Les « bonnes gens » semblaient d’anciens boutiquiers de petite ville. Ils s’imaginaient que leur fille les avait précédés, étant partie dès le matin. Marc nota l’animation de leur visage quand ils parlaient de Bertrande. Leur voix tremblait. On s’attendait à ce que des larmes jaillissent de leurs yeux.

À midi, Bertrande apparut sur la rivière, en canot. Elle s’excusa de son retard.

— Un très gros ennui… j’ai été voir M. Berjole, mon fiancé, qui demeure à dix minutes de la rivière. Or, ce matin, en descendant son escalier, il est tombé et s’est cassé la jambe… Cela recule notre mariage à je ne sais quelle date.

Elle dit ces mots d’un ton contrarié, mais exempt de toute tristesse.