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reux acquit une telle subtilité et usa d’une telle astuce qu’il devint inattaquable. M. Hélienne ne désarma pas. L’éducation des enfants exige qu’où les morigène. Marc ne méritant rien, il prit l’habitude de le terrasser avec les méfaits de ses camarades. D’un ton acerbe, il s’exclamait :

— Sais-tu ce que c’est que Charles, le fils de notre voisin ? une simple canaille ! Il vole les fruits dans les compotiers. Voilà ce que c’est que ton ami Charles.

Marc baissait la tête, tout honteux. Les vols commis par l’infâme Charles le bourrelaient de remords. Le lendemain, on lui reprochait l’hypocrisie du jeune Philippe, le surlendemain le libertinage du jeune Paul. L’infortuné n’osait plus se montrer en compagnie de ces galopins. À la moindre incartade de leur part, il tremblait, prévoyant la colère paternelle.

Le bijoutier, du reste, ne craignait pas de se déjuger. Au besoin, il recommandait l’exemple de cette canaille de Charles.

— Oh ! si j’avais un fils comme lui ! Quel modèle d’affection et de gentillesse ! enfin, tout le monde n’a pas la même chance.

Marc secouait ses anciens remords, imitait le bon Charles, mais prenait peu à peu en piètre estime l’opinion de son père.

La dureté de M. Hélienne provenait principalement de son avarice. Il s’épouvantait à l’idée qu’un jour Marc pût lui coûter de l’argent et l’obliger au paiement de quelque grosse dette. Aussi fulminait-il contre la prodigalité des fils.

— Tu connais l’exploit de ton ami