Page:Leblanc - L'œuvre de mort, paru dans le Supplément du 23 mars au 24 juin 1897.pdf/148

Cette page a été validée par deux contributeurs.

peine ? Le motif secret existait quelque part au fond de lui, sous un tas de prétextes spécieux. Il eût été facile de l’en extraire. Mais quelle fatigue vaine !

Marc s’enquit de certains détails. Les parents de Louise Doré, loyalement enrichis par le commerce, garantissaient à leur fille unique le tiers de leur fortune. Ils avaient déjà évincé trois prétendants trop modestes. Marc conclut :

— Elle est destinée au luxe. Je dois donc lui en inspirer le mépris.

Il débita contre l’argent une amère diatribe. Hélène partageait son avis.

Cette éducation le passionnait. Il s’adjugea de grandes dispositions à façonner l’âme d’autrui, et, en conséquence, l’âme des foules. Dès que les circonstances s’y prêteraient, il userait de cette faculté.

Un soir de bal, ils s’entretenaient auprès du buffet. Mme Doré s’approcha de sa fille, lui saisit le bras et l’entraîna, sans un mot d’excuse à l’égard de Marc.

Durant deux semaines, il ne les revit dans aucune des maisons où l’on se rencontrait généralement. Il se présenta chez eux. On ne le reçut pas. Il fut déconcerté, inquiet presque.

Il s’en ouvrit à un vieux monsieur, ami intime des Doré, et qui le traitait avec affection. Le vieux monsieur soupira :

— Que voulez-vous ? Mme Doré a ses raisons : on n’aperçoit que vous aux côtés de la petite ; ça la compromet, et les parents n’osent plus se risquer. Du moment que vos intentions ne sont pas…

Marc se dit :

— Tiens, c’était donc là le motif secret que je tenais en cachette.

Et tout haut, il prononça :