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plus. S’arracher à la douceur de la lampe devint même intolérable. Le whist et le piquet voleur réunissaient les sympathies de tous. Marc y jouait à merveille.

On ne laissait pas de causer au besoin. Élisabeth entamait une nouvelle version de son passé, sur laquelle devisaient les hommes. Frédéric exposait ensuite une collection d’anecdotes décousues. Hélienne écoutait, plaçait son mot, appréciait, tirait les conclusions générales. Le philosophe, l’appelait-on. Le niveau de leurs entretiens et de leurs occupations s’établissait d’après la moyenne de leurs intelligences. Pour y atteindre, on s’élevait ou l’on s’abaissait suivant sa propre hauteur. Marc avait beaucoup à s’abaisser.

L’intimité des deux amants se scellait surtout au lit. D’apparence placide, Élisabeth y révélait un tempérament d’amoureuse insatiable. Marc se pliait à ses fantaisies, un peu étonné de se voir au fond d’une ingénuité presque ridicule. Ses maîtresses d’occasion, jadis, ne l’avaient initié qu’aux amours les plus normales, et sa prétendue perversité à l’égard d’Aniella consistait plutôt en mortifications qu’en abus. Avec Élisabeth, il connut la folie du spasme et la brûlure des reins.

Par là, elle le domina. Il mendiait ses caresses et tâchait de les mériter en achetant des bijoux et des robes. Lors qu’elle lui tenait rigueur, étant assez vindicative, il eût tout fait pour la fléchir. À peine s’arrêtait-il en deçà des limites que traçait le soin de sa santé.