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Ainsi jamais il ne se trouvait seul. La ville était bien close, à l’abri d’un coup de main, les fortifications en bon état, les vigies attentives.

Il y eut une alerte. Lucien et Raoul lui demandèrent de l’argent. Il consentit, mais à une seconde tentative plus sérieuse, il éprouva la colère de l’homme que l’on veut frustrer d’un bien laborieusement conquis. Son refus et surtout les termes dont il l’accentua, fâchèrent les deux solliciteurs. Il ne les vit plus. Simultanément Aurélie et Francine partaient pour le midi. Ces défections ouvraient une brèche spacieuse, favorable à un assaut immédiat. Comment la combler ? Quelques jours passèrent en tumulte et désarroi.

Frédéric, le dernier qui restât de la bande, lui dit :

— Mon ami, le vide vous est funeste, vous n’êtes plus le même. Il vous faudrait une compagne assortie à votre humeur, dévouée, pas coureuse, tranquille. J’ai votre affaire.

La personne, en effet, une nommée Élisabeth soutint l’examen, d’ailleurs superficiel, de Marc. Heureux d’abandonner la direction de sa vie, il se laissa représenter dans toutes les négociations. Et un matin, il se réveilla propriétaire d’un corps de femme qui gisait à ses côtés. Il l’examina : le marché lui parut avantageux. La chair était blanche, la poitrine de bon aloi, l’haleine simple.

Elle dit des mots, action qui le gêna en lui prouvant que ce corps avait une existence propre et que la sienne en serait influencée. Il ne comprenait pas trop ce que cette femme faisait là. Elle lui semblait si lointaine, aussi indifférente qu’une étrangère à ses rêves et à ses besoins. Il railla cette association