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pas encore consenti à cette occupation, il détenait vraiment le don singulier de se soustraire aux idées gênantes ou du moins de les réduire en une sorte de sécrétion qui fermentait à son insu, et dont il suffisait d’analyser le résidu de temps en temps.

D’ailleurs son genre d’existence, durant cette période, aidait puissamment à la réussite de ses menues ruses intestines. Ses inquiétudes au sujet de la succession, sa visite au notaire, le règlement des comptes, un séjour à la campagne parmi ses fermes et une excursion sur les plages du littoral, l’avaient distrait tour à tour. Puis ce fut à Paris la recherche délicate d’un logement convenable en tous points.

Aujourd’hui, admirablement installé, ses pérégrinations finies, il ne pouvait plus refuser une solution aux divers problèmes de son existence. Que faire ? Dans l’ombre, l’instinct de son bonheur avait dû murmurer des avis et des ordres à sa mystérieuse conscience. Quel avis ? Quels ordres ?

Au bout d’une heure, Marc ferma la porte à clef, prit une grande feuille de papier, et en gros caractères, soulignant certains mots, il traça :

« Mon passé est mort. Toute crainte de châtiment serait puérile. Seul je sais. La lutte est en moi, et je n’ai qu’un ennemi, le remords. Pour l’étouffer je ne négligerai rien. »

Au-dessous, en lettres plus petites, il écrivit :

« La vie féconde où je chercherai mon développement, exigeant une trop grande solitude et des méditations trop constantes, serait propice à l’éclosion du remords. J’estime prudent de ne m’y conformer qu’après avoir fait l’épreuve