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— Me taire !… Qu’est-ce que tu es pour me dire de me taire ? hurla le colosse. Moi, je suis Nicolas Tchébine… et tu ne me fais pas peur ! Et puisqu’elle ne veut pas venir, la jolie poule, c’est moi qui viendrai. On va trinquer nous deux !…

Il se leva et s’avança vers la table de Nelly-Rose et de Gérard. Éméché mais non ivre, haut et solide comme une tour, un sourire bestial, insolent, sur sa large face à la courte barbe de moujik, il tenait à la main un grand verre plein de vodka.

— Tiens, goûte-moi ça, petit pigeon, dit-il, — retrouvant une expression du pays natal, — à Nelly-Rose en approchant le verre des lèvres de la jeune fille.

Nelly-Rose, avec un cri d’effroi et de dégoût, se rejeta en arrière.

Déjà Gérard était debout. Arrachant le verre au colosse, il lui en jeta le contenu au visage et, avant que l’autre eût pu esquisser le geste de le frapper, de son poing irrésistiblement lancé il l’atteignit au menton, et l’envoya sur le plancher poudreux.

Instantanément, tout ce qui restait de l’assistance fut debout et accourut pour voir la bataille.

Les quatre compagnons de la brute renversée s’étaient dressés avec des cris de colère. Tous ensemble se ruèrent sur Gérard.

Gérard fit deux pas au-devant d’eux afin de protéger Nelly-Rose et d’avoir ses mouvements libres. Un sourire durcissait son visage, une flamme impitoyable flambait dans ses yeux. C’était le Gérard de l’action et de la lutte.

Athlétique, en quatre coups de son