Page:Leblanc - De minuit à sept heures, paru dans Le Journal, 1931.djvu/77

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Tout autour de l’espace vide réservé aux danseurs se trouvaient des tables presque toutes occupées, et où étaient servies des bouteilles de champagne dans leur seau à glace, ou bien la blanche vodka en des verres irisés. Des boules de couleur s’échangeaient de table en table. Des serpentins accrochaient partout leurs rubans multicolores.

Au bout du hall, à l’écart, dans un renfoncement entre deux piliers, il y avait une table libre. Gérard y conduisit Nelly-Rose et commanda du champagne.

Nelly-Rose regardait curieusement autour d’elle. Elle avait l’esprit parfaitement libre. Rien à redouter dans cette foule. Son compagnon était loyal ; aucun doute à ce sujet. Et, détendue, elle se laissait aller à l’attrait, nouveau pour elle, un peu étrange, de cette fête où elle ne discernait pas que l’exubérance peu à peu remplaçait la gaîté, que l’ivresse, pour certains, remplaçait l’animation.

— Comme je suis heureux de vous voir plus gaie ! lui dit Gérard, dont la voix était douce, mais dont l’œil attentif l’observait, notant les impressions qui se succédaient en elle. Je retrouve, enfin, votre expression habituelle… votre sourire d’enfant.

Elle le regarda, étonnée.

— Mais, vous parlez comme si vous me connaissiez déjà ? Mon sourire d’enfant, dites-vous…

Il plaisanta :

— Mais oui, je vous ai connue tout enfant.

— Moi !

— Ou tout au moins votre photographie… Vous aviez dix ans.

— Mais c’est impossible ! Racontez-moi cela.