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— C’est vous, murmura Nelly-Rose… C’est vous… Vous êtes donc Ivan Baratof ?

Gérard eut une hésitation qu’elle ne perçut pas. En vérité, il n’avait pas prévu le mensonge auquel il s’exposait. Il répondit évasivement :

— Baratof est un nom russe que je porte quelquefois, là-bas, depuis la guerre. Je suis Français.

Toujours adossée au mur, la jeune fille essayait, dans son désarroi, de réfléchir, de comprendre. Pas une seconde, elle ne pressentit une supercherie, que rien ne pouvait lui indiquer, mais toutefois elle demanda :

— Mais vous n’êtes donc pas arrivé ce soir seulement ?

— Non, je ne suis venu au Nouveau-Palace qu’à sept heures, mais j’étais à Paris, dès ce matin.

— C’est vous… c’est vous… répéta Nelly-Rose à voix basse. Mais, pourquoi m’avez-vous poursuivie ainsi tantôt ? Que me voulez-vous ?

— Je voulais vous voir, être remarqué par vous. L’incident du chauffeur m’en a fourni l’occasion… je voulais vous intriguer et n’être plus pour vous un inconnu.

Il parlait doucement, avec un sourire presque caressant.

Mais cette douceur et ce sourire irritèrent Nelly-Rose, qui dit d’une voix sourde :

— Vous êtes plus qu’un inconnu… un ennemi…

Sans répondre, toujours souriant, il fit un pas dans la direction de la jeune fille. Et, tout à coup, elle fut éperdue.

— N’avancez pas ! cria-t-elle, je vous défends d’avancer !

Le sourire de Gérard s’accentua, devint ironique.

— Cependant, mademoiselle, nous