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te l’aurais dit si j’avais su que je te verrais. C’est ma pensée même.

Il fit quelques pas vers elle et lui dit :

— Tu as bien compris, Henriette ?

— Oui.

— Et… et tu me promets ?…

Elle secoua la tête et déclara :

— Non, je ne te promets pas.

— Cependant, si tu as compris… ne crois-tu pas que c’est là une promesse que tu me doives ?…

Elle sourit.

— Je n’ai pas de promesse à te faire. L’avenir est loin. Et tu es bien vivant. Alors… il me semble que ton vœu pourrait s’accomplir sans qu’il soit nécessaire… sans qu’il soit nécessaire que tu disparaisses, toi.

Son sourire avait ce quelque chose de spécial et de mystérieux, de charmant et d’affolant, où il y a de la coquetterie et de la pudeur, et qui est le signe de l’abandon chez la femme. Depuis combien de temps ne l’avait-il plus vu, ce sourire ! Il en fut ébloui et trembla sur ses jambes.

— Qu’est-ce que tu veux dire, Henriette ?

Elle souriait toujours en le regardant au fond des yeux, et il balbutia de nouveau :

— Qu’est-ce que tu veux dire, Henriette ?

— Pourquoi te répondre ? fit-elle. Tu me comprends mieux que si je te répondais.

Elle lui tendit les mains, ses mains blanches et parfumées. Il les baisa ardemment. Mais comme il hésitait, n’osant pas encore croire à son bonheur, elle l’attira contre elle et lui entoura la tête de ses bras.