Page:Leblanc - Ceux qui souffrent, recueil de nouvelles reconstitué par les journaux de 1892 à 1894.pdf/67

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

melin s’enorgueillissait.

À onze heures exactement on se mettait à table. Les repas étaient empreints de solennité. Joséphine, qui en avait surveillé la confection, épiait avec inquiétude le visage de monsieur. Monsieur d’ailleurs parlait peu. Il approuvait ou blâmait en quelques mots. Madame rayonnait ou courbait la tête, selon la sentence. En dehors de cela, leurs entretiens se bornaient à de courtes réflexions qu’Auguste émettait parcimonieusement sur les choses et sur les gens. Joséphine les accueillait comme des oracles.

Le ménage s’entendait assez bien. L’un dominait l’autre, cause d’harmonie. Madame craignait monsieur. De fait, il se montrait dur pour elle.

À cinq heures, Auguste quittait définitivement son bureau. Souvent madame Jumelin le rejoignait à Duclair et ils rendaient ensemble des visites ou se promenaient le long du quai en regardant glisser les grands bateaux.

Tous les dimanches Joséphine, que les opinions avancées de son frère scandalisaient, allait à la grand’messe, un paroissien sous le bras. Auguste, planté ostensiblement devant la porte de sortie, l’attendait hors de l’église. Au retour on achetait une brioche. Parfois madame rapportait un morceau de pain bénit, mais monsieur refusait d’en manger.

« Une fois par semaine, le jeudi, on recevait quelques amis. Le repas achevé,