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Elle résista. Sa voix se fit suppliante :

— Je vous en conjure, mon ami, laissez-moi m’habituer, il me semble que c’est moins grave de ne pas déchoir trop vite. Je vous suivrai où vous voudrez me conduire… mais doucement, tout doucement, j’ai si peur !

Elle se pelotonnait dans mes bras, cherchant une protection contre elle-même. Je la rassurai. Qu’ai-je à craindre ? Elle sera mienne, parce que notre cœur et notre chair l’exigent.

Nous causâmes, et seulement au départ, je lui dis :

— Il faut franchir la première étape, Geneviève, donnez-moi votre bouche.

Elle me la donna.

Et je me souviens — pourquoi me souvenir de cela ? — que Dick se leva d’un bond et nous regarda de ses yeux ronds et immobiles. Ce regard — décidément, c’est étrange — ce regard me poursuit. J’oublie presque le sien, à elle. Quel charme pourtant, et quelle affection ! Toute son âme tendre s’y reflète. Mais lui, pourquoi me regardait-il ainsi ? On croirait qu’il est jaloux !


… J’ai rêvé de lui. J’embrassais Geneviève, et peu à peu sa figure se changea, celle de Dick apparut, grimaçante. Il me mordit au nez. Je me réveillai. Ce matin je fus soucieux, et quand j’al-