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DICK



… Tantôt Bertol m’a dit :

— Mon vieux, je m’en vais, quelques jours d’absence, je te confie ma femme.

Un petit chien noir à poil ras vint se frotter contre ses jambes. Il reprit en riant :

— À toi aussi, je la confie, Dick. Ayez bien soin d’elle tous les deux.

Cette plaisanterie me déplut. Dick et moi, nous nous détestons depuis la première heure de notre connaissance. En vain j’ai tenté d’obtenir ses faveurs en le comblant de sucreries, il accueille mes avances par des aboiements furieux. Si je le flatte, il essaie de me mordre. Si je lui envoie furtivement quelque tape, il se plaint jusqu’à ce que sa maîtresse devine la cause de son mal et me reproche ma brusquerie. Notre inimitié est chose avouée. Bertol ne l’ignore point. Aurait-il eu l’intention de me blesser ?

Il partit. Sa femme prononça :

— Vous m’aimez toujours ?

— Je vous adore, Geneviève.

Elle s’écria résolûment :

— Moi aussi, je vous aime, et je veux être heureuse enfin, heureuse par vous.

La chère créature, elle m’appartiendra. Comme il y a longtemps que c’est