Page:Leblanc - Ceux qui souffrent, recueil de nouvelles reconstitué par les journaux de 1892 à 1894.pdf/198

Cette page a été validée par deux contributeurs.

périodique de la même torture. Ayant appris l’horreur de la première épreuve, il la plaignit de toute son âme tendre.

Et chaque mois en effet, le mal revint. Comme à une échéance, il se présentait, l’exact et impitoyable créancier. Il réclamait son compte de pleurs, de cris, d’insomnies, de convulsions. Et il laissait le terrible souvenir de son passage et l’épouvante plus terrible encore de son arrivée prochaine.

Le cœur de l’ami se brisait à la retrouver blanche avec de grands yeux mornes aux contours bleuis. Il s’en voulait que son dévouement fût inutile et impuissante sa force d’homme. Il n’osait plus lui parler de ses travaux, de son entrée dans la lutte humaine. Elle était si faible, elle, et murmurait de si misérables rêves, rêves de convalescence, rêves de santé !

Elle perdit son père et sa mère. Elle resta sans ressources presque. Et avec les années le mal augmentait.

— N’y a-t-il point de remède, demanda le jeune homme au docteur ?

— Si… peut-être… le mariage, lui fut-il répondu.

Il tressaillit. Instantanément il pensa qu’il était l’unique époux possible, l’unique sauveur. Nul autre que lui ne la chérissait. Il s’interrogea. L’aimait-il ? D’amour ou de désir, non. De pitié, oui,