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“813”

poursuivait, et le cherchant pour l’épouser et pour retourner, reine, en ce petit royaume de Veldenz d’où ses parents avaient été ignominieusement chassés.

Et il la voyait au Palace-Hôtel, dans la chambre de son frère Altenheim, alors qu’on la supposait à Monte-Carlo. Il la voyait, durant des jours, qui épiait son mari, frôlant les murs, mêlée aux ténèbres, indistincte et inaperçue en son déguisement d’ombre.

Et une nuit, elle trouvait M. Kesselbach enchaîné, et elle frappait.

Et le matin, sur le point d’être dénoncée par le valet de chambre, elle frappait.

Et une heure plus tard, sur le point d’être dénoncée par Chapman, elle l’entraînait dans la chambre de son frère, et le frappait.

Tout cela sans pitié, sauvagement, avec une habileté diabolique.

Et avec la même habileté, elle communiquait par téléphone avec ses deux femmes de chambre, Gertrude et Suzanne qui, toutes deux, venaient d’arriver de Monte-Carlo, où l’une d’elles avait tenu le rôle de sa maîtresse. Et Dolorès, reprenant ses vêtements féminins, rejetant la perruque blonde qui la rendait méconnaissable, descendait au rez-de-chaussée, rejoignait Gertrude au moment où celle-ci pénétrait dans l’hôtel, et elle affectait d’arriver elle aussi, ignorante encore du malheur qui l’attendait.

Comédienne incomparable, elle jouait l’épouse dont l’existence est brisée. On la plaignait. On pleurait sur elle. Qui l’eût soupçonnée ?

Et alors commençait la guerre avec lui,