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“813”

Il ricanait rageusement, tandis que Dolorès le considérait avec stupeur :

— Un grand-duc, lui ! Hermann IV, duc de Deux-Ponts-Veldenz ! Prince régnant ! Grand électeur ! mais c’est à mourir de rire. Lui ! Mais il s’appelle Baupré, Gérard Baupré, le dernier des vagabonds… un mendiant que j’ai ramassé dans la boue. Grand-duc ? Mais c’est moi qui l’ai fait grand-duc ! Ah ! ah ! que c’est drôle !… Si vous l’aviez vu se couper le petit doigt… trois fois il s’est évanoui… une poule mouillée… Ah ! tu te permets de lever les yeux sur les dames et de te révolter contre le maître… Attends un peu, grand-duc de Deux-Ponts-Veldenz.

Il le prit dans ses bras, comme un paquet, le balança un instant et le jeta par la fenêtre ouverte.

— Gare aux rosiers, grand-duc, il y a des épines.

Quand il se retourna, Dolorès était contre lui, et elle le regardait avec des yeux qu’il ne lui connaissait pas, des yeux de femme qui hait et que la colère exaspère. Était-ce possible que ce fût Dolorès, la faible et maladive Dolorès ?

Elle balbutia :

— Qu’est-ce que vous faites ?… Vous osez ?… Et lui ?… Alors, c’est vrai ?… Il m’a menti ?

— S’il a menti ? s’écria Lupin, comprenant son humiliation de femme… S’il a menti ? Lui, grand-duc ! Un polichinelle tout simplement dont je tenais les ficelles… un instrument que j’accordais pour y jouer des airs de ma fantaisie ! Ah ! l’imbécile ! l’imbécile !