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“813”

sauter sur l’homme. Auparavant, il voulait voir ce qu’il venait faire…

La main se leva. Allait-elle frapper ? M. Lenormand calcula la distance pour arrêter le coup. Mais non, ce n’était pas un geste de meurtre, mais un geste de précaution. Si Pierre Leduc remuait, s’il tentait d’appeler, la main s’abattrait.

Et l’homme s’inclina vers le dormeur, comme s’il examinait quelque chose.

— La joue droite… pensa M. Lenormand, la cicatrice de la joue droite… il veut s’assurer que c’est bien Pierre Leduc.

L’homme s’était un peu tourné, de sorte qu’on n’apercevait que les épaules. Mais les vêtements, le pardessus étaient si proches qu’ils frôlaient les rideaux derrière lesquels se cachait M. Lenormand.

— Un mouvement de sa part, pensa-t-il, un frisson d’inquiétude, et je l’empoigne.

Mais l’homme ne bougea pas, tout entier à son examen. Enfin, après avoir passé son poignard dans la main qui tenait la lanterne, il releva le drap de lit, à peine d’abord, puis un peu plus, puis davantage, de sorte qu’il advint que le bras gauche du dormeur fut découvert et que la main fut à nu.

Le jet de la lanterne éclaira cette main. Quatre doigts s’étalaient. Le cinquième était coupé à la seconde phalange.

Une deuxième fois, Pierre Leduc fit un mouvement. Aussitôt la lumière s’éteignit, et durant un instant l’homme resta auprès du lit, immobile, tout droit. Allait-il se décider à frapper ? M. Lenormand eut l’angoisse du crime