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c’est-à -dire exactement le contraire. Esterhazy, au point de vue graphologique, d’après ses caractères, a des signes d’égoïsme. (Bruits dans l'auditoire.)

Je disais donc que l’écriture de M. Esterhazy se manifeste par des traits centripètes, c’est-à-dire qu’il ramène les traits vers lui, tandis que l’autre que je n’ai pas à nommer, a une écriture à traits centrifuges. D’autre part, Esterhazy a une écriture dextrogyre, c’est-à-dire une écriture dont tous les mouvements vont vers la droite, tandis que celui qui a été condamne a une écriture sinistrogyre ; c’est donc tout le contraire.

Si on examine les lettres du bordereau et les lettres de M. Esterhazy, on constate ceci, c’est que l’auteur du bordereau et M. Esterhazy ont tous les deux une écriture extrêmement sténographique, c’est-à-dire qu’ils font abstraction de tous les traits calligraphiques, de ce qu’on peut appeler les traits calligraphiques d’une écriture ; en d’autres termes, M. Esterhazy, comme l’auteur du bordereau, au lieu d’écrire un f comme nous l’écrivons tous, d’une manière plus ou moins calligraphique, l’écrivent avec une écriture sténographique comme ceci…

Prenons maintenant quelques lettres au hasard, prenons d’abord la lettre a. Dans la lettre a du bordereau, comme dans la lettre a de M. Esterhazy, nous retrouvons des formes différentes ; si vous analysez l’écriture du bordereau et l'écriture de M. Esterhazy, vous y trouverez dix formes d’a : l’a bien tait, comme par exemple, à la ligne 28, l’a du mot adresse ; mais c'est une exception très grande, parce que l’a dégénère, il devient poché empâté, pour finir par n’être plus qu’un accent circonflexe ce qui vous démontre encore que l’écriture du bordereau, comme l’écriture d’Esterhazy, est une écriture centripète et une écriture dextrogyre, et vous allez en avoir d autres exemples.

Prenons la lettre d. Je crois que M. Teyssonnières a insisté sur les particularités de cette lettre, et nous allons voir qu'il a malheureusement insisté sur un fait erroné, parce que c'est la condamnation la plus absolue de l’expertise à laquelle il s'est livré.

Il y a dans le bordereau 29 d. Sur ces 29 d, nous trouvons des d à hampe bouclée, bien arrondie ; il y a, sur ces 29 d, 21d bouclés à hampe bien caractérisée, et deux d droits à l'anglaise. Retenez cette proportion, 29 d, dont 27 bouclés et 2 droits à l’anglaise. Je prends un passage de M. Esterhazy, et je trouve 27 d dont 25 d bouclés de forme dextrogyre et 2 d à l’anglaise, proportion identique à celle du bordereau. Il y a là un trait inconscient, un trait naturel, un signe inconscient qui se retrouve à la foi dans l’écriture d’Esterhazy et dans l’écriture du bordereau.

J’arrive, messieurs les jurés, à la lettre j, et ici 1'observation que je vais faire est très importante. Le j est une des particularités les plus curieuses du bordereau et de 1'écriture de M. Esterhazy. Je vous disais que l’écriture de M. Esternazy comme celle du bordereau est une écriture centripète.