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M. le Président. — Vous ferez ce que vous voudrez dans votre plaidoirie.

Me  Clémenceau. — Alors empêchez-moi de prendre la parole et je me tairai.

M. le Président. — Je vous retire la parole au point de vue de la plaidoirie. Il faut poser des questions, si vous voulez.

Me  Clémenceau. — Je veux, par les dépositions des deux témoins qui sont en désaccord, apporter la preuve de la vérité.

M. le Président. — Pas en ce moment-ci.

Me  Clémenceau. — Mais...

M. le Président. — Quand vous plaiderez.

Me  Clémenceau. — Je prétends qu’en deux mots je vais faire savoir quel est celui des deux officiers en présence, qui a commis une erreur involontaire. Je suis dans un incident, je m’y tiens.

M. le Président. — Posez des questions. Vous n’avez pas la parole pour plaider.

Me  Clémenceau. — Me retirez-vous la parole pour prouver la vérité ?

M. le Président. — Je vous ôte la parole pour plaider, je vous le répète.

Me  Clémenceau. — Je me permets de vous poser cette question, monsieur le Président : il y a une contradiction absolue entre les dires de deux officiers de l’armée française... Je ne plaide pas en ce moment-ci.

M. le Président. — Si. Vous n’avez pas la parole pour plaider. Déposez des conclusions, rien de plus.

Me  Clémenceau. — Il y a une chose ici qui doit préoccuper tout le monde: Deux officiers se sont donné un démenti ici; si vous m’accordez la parole, je vais en deux mots....

M. le Président. — Non, déposez des conclusions, je ne vous accorde pas la parole.

Me  Clémenceau. — Dans ces conditions, je me rassieds.

Me  Labori. — Et moi, je me relève!

Je veux m’expliquer très rapidement, avec vous-même, monsieur le Président. Me le permettez-vous et me permettez-vous de vous faire connaître les raisons pour lesquelles je prends la parole ?

M. le Président. — Est-ce pour plaider ?

Me  Labori. — Avec vous ? Non, ce n’est pas pour plaider.

M. le Président. — Pendant l’interrogatoire des témoins, vous ne pouvez que poser des questions.

Me  Clémenceau. — Je vous demande pardon, l’article 319 nous permet de prendre la parole.

M. le Président. — Pas pour plaider.

Me  Labori. — Il se présente un incident: je vous demande pardon, mais je voudrais vous adresser, monsieur le Président, respectueusement, des explications pour obtenir la parole de la manière que je l’entendrai, quand vous m’aurez compris.

M. le Président. — Maître Labori, vous n’avez la parole pendant le cours des débats que pour poser des questions...