M. le colonel Pigquart. — Oui, mon général.
M. le général de Pellieux. — J’ai prévenu M. le colonel Picquart que j’avais relevé une faute grave contre lui; j’en ai avisé le gouverneur militaire de Paris. Il n’était nullement question du Conseil de guerre, ni de rien du tout à ce moment-là.
Me Labori, au Président. — Encore une question.
M. le Président. — Abrégez, je vous en prie; car vous plaidez en même temps que vous posez des questions.
Me Labori. — Toute la pitié que m’inspire l’ennui que je vous cause ne me fera pas abréger d’une minute...
M. le Président. — C’est bien simple cependant.
Me Labori. — Mais non, ce n’est pas simple... Je dis à M. le général de Pellieux: Votre première enquête militaire concluait ainsi: pas de charges...
M. le général de Pellieux. — Pas de preuves.
Me Labori. — J’aime mieux cela, je suis heureux de retenir la distinction et je dis: Est-ce qu’à ce moment-là le bordereau avait été expertisé?
M. le génébal de Pellieux. — Je n’avais pas d’autre mission que celle de mettre M. Mathieu Dreyfus en mesure d’apporter la preuve de son accusation; voilà tout ce qu’on m’avait demandé de faire; j’ai fait ce qu’on m’avait demandé.
Me Labori. — Oui ou non, à ce moment-là, quand on disait: Pas de preuves ! le bordereau était-il expertisé?
M. le général de Pellieux. — Non.
Me Labori. — Merci.
M. le Président, à Me Labori. — Avez-vous d’autres questions?
Me Labori. — Oui, monsieur le Président, j’ai encore d’autres questions à poser à M. le général de Pellieux.
On distingue un dossier judiciaire et un dossier secret; qu’est-ce que M. le général de Pellieux entend par ce dossier secret?
M. le général de Pellieux. — Je ne crois pas devoir répondre à cette question, le chef du service des renseignements n’ayant pas voulu y répondre.
Me Clémenceau. — Cela prouve en quelle estime M. le général de Pellieux tient le colonel Picquart, puisqu’il a adopté sa ligne de conduite, et qu’il croit devoir ne pas s’en écarter.
M. le Président. — Ne plaidez pas en ce moment, posez des questions, voilà tout.
Me Labori, — Je n’ai plus de questions à poser à M. le général de Pellieux, mais j’ai une série de questions à poser à M. le commandant Lauth. (Ce témoin arrive à la barre).
M. Lauth était-il au courant de l’origine du petit bleu dont il a été question et qui constituait une charge contre M. Esterhazy?
M. le commandant Lauth. — L’origine absolue?
Me Labori. — Puisqu’on ne peut rien dire là-dessus, je ne veux pas être indiscret.
M. le commandant Lauth. — Vous me demandez l’origine,