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dépositions de M. le colonel Henry et de M. Gribelin. Comme j’ai fait l'instruction, j’ai reçu les dépositions de ces deux officiers. Je puis dire qu’il n’y a pas confusion; tous les deux, à deux moments différents, dans la même journée, sont entrés dans le bureau du colonel Picquart et ont fait deux déclarations distinctes... Je suis sûr que le colonel Henry vous dira la même chose: le colonel Henry est entré dans le bureau du colonel Picquart dans la même journée que M. Gribelin; mais il y a là des déclarations absolument distinctes.

Me Labori. — M. de Pellieux n’a-t-il pas dit que c’était dans la même journée?

M. le Président. — Il l’a dit.

Me Labori. — Cependant M. Gribelin n’a-t-il pas dit que cela s’était passé alors que le colonel Henry était en permission? (Bruits.)

M. le général de Pellieux n’a pu établir que c’était dans la même journée, puisqu’à cette époque M. le colonel Henry était absent... on ne peut pas sortir de là.

M. le Président. — Le témoin Gribelin ne peut pas répondre à cette question.

Me Labori. — M. Gribelin demande qu’on apporte le dossier, je m’associe à sa demande...

M. le Président. — Il a été répondu à cela par la Cour.

Me Labori. — Cependant, M. le général de Pellieux, qui est un loyal soldat, pourrait apporter ce dossier...

M. le Président. — Je vous répète que la Cour a statué.

Me Labori. — Cependant, si demain, M. le général de Pellieux se présente avec ce dossier, la Cour le recevra?

M. le Président. — La Cour ne le recevra pas.

M. le général de Pellieux. — Mais je ne l’ai pas, ce dossier!.. Je demande à faire une observation: Je crois qu’on ne se rend pas bien compte du rôle que j’ai eu à remplir dans cette affaire et que, même certains magistrats ne se rendent pas bien compte du fonctionnement de la justice militaire. (Bruits.)

Il n’y a certainement rien d’extraordinaire dans ce que je dis. Lorsqu’une plainte est portée, l’officier de police judiciaire fait faire une information préliminaire, qui n’a pas encore un caractère légal; à la suite de cette information préliminaire, la plainte est envoyée au chef de la justice qui donne l’ordre d’informer, et l’information ne commence réellement qu’au Conseil de guerre. Ce que j’ai fait, c’est une information préliminaire qui ne pouvait absolument qu’éclairer M. le Gouverneur de Paris, pour savoir s’il y avait lieu de poursuivre ou de ne pas poursuivre le commandant Esterhazy.

Voilà ce que je voulais dire.

Me Labori. — Quelle est la portée de l’explication fournie par le témoin? Veut-il dire par là que, son information étant préliminaire, il n’avait pas à prendre les mesures de nature à lui permettre d’arriver à la manifestation de la vérité?