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de deux heures trois quarts, il n’a été retenu, à titre officiel, qu’une déclaration de quelques lignes, tout le reste de l’entretien ayant été considéré comme entièrement confidentiel ?

M. le général de Pellieux. — Il a été retenu comme déclaration de M. Leblois, qu’il m’avait dit que le colonel Picquart lui avait dit qu’il y avait, au ministère de la guerre, un dossier dans lequel une pièce accusait formellement le commandant Esterhazy de trahison. Il a été retenu, et j’en ai rendu compte, que M. Leblois avait entre les mains quatorze lettres du gênerai Gonse.

Me Labori. — Je voudrais que le général fut assez bon pour répondre directement à ma question.

(Maître Labori pose de nouveau la question.)

M. le général de Pellieux. — Il n’y a rien eu de confidentiel dans l’entretien et je n’en ai retenu que les points importants. M. Leblois aurait pu faire une plaidoirie de quatre heures... Je n’ai retenu que les points importants, pour en rendre comnte.

Me Labori. — M. Leblois n’a-t-il pas remis au général de Pellieux, au nom de M. Scheurer-Kestner, trois pièces, savoir : deux photographies de lettres récentes du commandant Esterhazy et un petit-bleu en date du 9 novembre 1897, adressé a M. Scheurer-Kestner et portant ces mots : « Piquart est un gredin, vous en aurez la preuve par le second bateau de Tunisie» ?

M. le général de Pellieux. — Parfaitement, je l'ai dit hier.

Me Labori. — Les caractères tracés à la plume n'avaient-ils pas la forme de majuscules allongées ?

M. le général de Pellieux. — Les pièces sont au dossier

Me Labori. — Le général comprend que, dans l’impossibilité où nous sommes d’obtenir le dossier — et s’il pouvait obtenir qu’une mesure différente fût prise, nous lui en serions reconnaissants — nous sommes obligés de nous renseigner par l’intermédiaire des témoins que nous avons la bonne fortune, exceptionnellement, de pouvoir entendre.

Le petit-bleu dont je viens de parler ne présentait-il pas, à cet égard tout au moins, une analogie curieuse avec le petit-bleu que le commandant Esterhazy prétendait avoir reçu de la dame voilée ?

M. le général de Pellieux. — Il présentait l’analogie que présentent entre elles toutes les pièces écrites en caractères d’imprimerie.

Me Labori. — Le général de Pellieux n'a-t-il pas jugé cette coïncidence assez frappante pour se faire représenter ledit petit-bleu au ministère de la guerre, le jour même, dans l'après-midi ? N’a-t-il pas constaté que le procédé était identique ?

M. le général de Pellieux. — Je ne me suis pas fait représenter le petit-bleu à ce moment ; je n’ai eu le petit-bleu entre les mains que lorsque j’ai été chargé d’une enquête judiciaire. Je ne pouvais à ce moment demander de pièces au ministère de