Page:Le proces Zola devant la cour d assises de la Seine et la cour de cassation, Paris Bureaux du Siècle etc , 1898, Tome 1.djvu/247

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police judiciaire, et le Code de justice militaire m'en donnait le droit.

J'ajoute que c'était mon devoir; cette perquisition m'avait été demandée, et je ne pouvais m'y refuser sous peine d'être accusé de ne pas avoir voulu arriver à la découverte de la vérité. Je fis donc faire une perquisition chez le colonel Picquart, perquisition régulière, par M. Aymard, commissaire de police, attaché au gouvernement de Paris.

On apporta un scellé que, naturellement, je conservai et que je n'ai ouvert qu'en présence du colonel Picquart. — Je n'ai conservé, du reste, de ce scellé, assez considérable, qu'une seule lettre dont je vous parlerai tout à l'heure — Je rendis au colonel Picquart toutes les autres lettres, après y avoir jeté un coup d'oeil très indifférent. Il y avait de nombreuses lettres de sa mère, que j'ai parfaitement respectées, une nombreuse correspondance de Mlle Blanche de Comminges, et je n'ai gardé qu'une lettre de Mlle Blanche de Comminges qui m'a paru avoir un intérêt subséquent.

Je fis successivement alors, dans cette enquête judiciaire, comparaitre les différents temoins que j'avais vus dans la prmière... Et, alors, je vous demande à vous exposer, dans ce moment-ci les deux points sur lesquels ont porté mes investigations.

Il s'agissait d'abord du bordereau. M. Mathieu Dreyfus avait accusé le commandant Esterhazy d'être l'auteur du bordereau... A propos du bordereau, je demanderai de faire une légère observation.

On a beaucoupa parlé du bordereau. Peu de gens l'ont vu, je crois qu'il serait facile de les compter ; beaucoup de gens en on vu des fac-similés. Eh bien ! je dois dire... je l'ai vu..., je dois dire que ces fac-similé ressemblent singulièrement à des faux et que, avoir la prétention de faire une expertise d’écriture sur les fac-similés qui ont paru dans les journaux, me parait s’avancer beaucoup. Rien ne ressemble moins au fac-similé des journaux que le bordereau original. Par conséquent, toutes les expertises qui ont été faites à la légère sont entachées absolument de faux.

J'écoutai la défense du commandant Esterhazy sur le bordereau ; je ne vous la répéterai pas, elle a été partout. Si cependant on insiste..., il a cherché à démontrer, — son interrogatoire est là et je vais me borner à le prendre, — qu'il lui était impossible de se procurer les pièces énoncées dans le bordereau. Le Conseil de guerre a jugé là-dessus ; je n'insisterai pas davantage.

Mais, au cours de l'interrogatoire du colonel Picquart, se produisit un incident. Le colonel Picquart me parla alors de la pièce dont m'avait entretenu M. Leblois et M. Scheurer-Kestner. Cette pièce était une carte-télégramme, un petit-bleu, qui, d'après le colonel Picquart, avait la même origine que le borderau. Je ne veux pas en dire davantage...la même origine !...