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CONCLUSIONS DE M. L’AVOCAT GÉNÉRAL
relatives à l’apport des pièces demandées
par la défense.

M. l’Avocat général. — Je dépose des conclusions dans le sens que j’ai indiqué :

Le Procureur général près la Cour d’appel,

Attendu que, d’après leur notification du 24 janvier, les prévenus prétendent invoquer tous les dossiers et pièce qui sont aux mains, soit de M. le Ministre de la guerre, soit des divers magistrats chargés d’instruire sur diverses plaintes relatives aux faits susénoncés, et font sommation au Procureur général d’avoir à produire au débat « tous les dossiers et pièces dont s’agit », notamment le dossier de l’affaire Dreyfus, le dossier de l’affaire Esterhazy, le dossier de la plainte en faux déposée par le lieutenant-colonel Picquart ;

Que cette prétention tend à une audacieuse interversion des rôles du Ministère public et des prévenus ; que les prévenus doivent avoir la preuve de l’imputation diffamatoire avant de la lancer ; que c’est pour ces motifs que l’article 52 de la loi leur impose l’obligation de notifier dans les cinq jours la copie des pièces dont ils entendent faire ressortir cette preuve ;

Attendu que la sommation générale de communiquer tous « dossiers et pièces » ne peut même pas être prise au sérieux :

Que la sommation spéciale de communiquer les dossiers des affaires Dreyfus et Esterhazy, la procédure en cours sur une plainte du lieutenant colonel Picquart, est contraire aux règles les plus élémentaires du droit ;

Que MM. Perrenx, gérant du journal l'Aurore, et Zola, homme de lettres, sont des tiers par rapport aux dossiers Dreyfus et Esterhazy et ne figuraient à aucun titre dans ces instances ;

Que la plainte déposée par le lieutenant-colonel Picquart leur est aussi complètement étrangère et que le plaignant aura seul qualité pour intervenir, s’il le juge convenable, dans le règlement ultérieur de la procédure ;

Attendu, d’ailleurs, que l’article 52 de la loi de 1881 impose formellement au prévenu l’obligation de notifier dans les cinq jours de la citation, sans aucune distinction, toutes pièces dont il entend faire ressortir la preuve des imputations diffamatoires ;

Que les procédures visées ne remplissant pas cette condition ne peuvent être utilisées aux débats ;

En ce qui concerne la déclaration du témoin Gribelin, qui serait dans un dossier soumis à un Conseil d’enquête ;

Pour les motifs ci-dessus,

Conclut qu’il plaise à la Cour refuser la communication demandée.

M. le Président, à l'audiencier. — Faites appeler le témoin suivant, ce témoin est M. Trarieux.

Me Clémenceau. — Nous désirons ne pas faire entendre M. Trarieux