Page:Le proces Zola devant la cour d assises de la Seine et la cour de cassation, Paris Bureaux du Siècle etc , 1898, Tome 1.djvu/104

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M. Leblois. — Ceci se passait en novembre 1896 ; quant à la fausse lettre Speranza, elle se place au mois de décembre 1896

Me Clémenceau. — Alors, ma question était juste ; tous ces faits se passaient bien à la même époque.

Me Labori. — Je passe, monsieur le Président, à un tout autre ordre de faits. Est-ce que M. Leblois n’est pas au courant des relations de la famille de Comminges et de M. le colonel Picquart, d’une part, et des relations de la même famille, notamment de Mlle Blanche de Gomminges, avec M. le colonel du Paty de Clam, d’autre part ; et, afin d’abréger, M. Leblois ne connaît-il pas, dans les rapports qui ont eu lieu en 1892 entre M. du Paty de Glam et la famille de Comminges, certains faits qui présentent une analogie singulière avec quelques scènes mystérieuses relatives à l’affaire Esterriazy, notamment avec l’intervention d’une certaine dame voilée.

M. le Président. — Vous venez d’entendre la question, Monsieur, voulez-vous y répondre ?

M. Leblois. — Je crois que, sur ce point, je dois être assez réservé.

M. le Président. — Dites seulement ce que vous croyez devoir dire.

M. Leblois. — Je sais, en effet, que le colonel Picquart était un ami de la famille de Comminges ; M. le capitaine de Comminges, qui est cité comme témoin, a servi autrefois sous ses ordres au Tonkin, et le colonel était reçu avec bienveillance par Mlle Blanche de Comminges, qui est une personne déjà d’un certain âge. Je sais qu’il y a eu, en effet, en 1892, des lettres anonymes, des rendez-vous donnés aux environs du Jardin de Paris dans des conditions dignes d’un roman-feuilleton.

Me Labori. — Bien entendu, il ne m’appartient ici d’exercer aucune pression sur M. Leblois. M. Leblois sait exactement ce qu’il peut dire ; mais, étant donné qu’il a pu nous fournir les indications que vous avez entendues, je lui serai reconnaissant de préciser et de dire à quel propos ces scènes ont eu lieu, quel a été le rôle joué par M. du Paty de Clam, et notamment quelle est la scène qui a eu lieu en 1892, non pas au pont Alexandre III, mais à l’endroit où sont les chantiers de construction, endroit quia été choisi par la dame voilée de 1897.

M. Leblois. — Il me semble difficile de refuser la vérité à MM. les jurés et à la Cour. Le comte de Comminges avait reçu un certain nombre de lettres anonymes fort graves : il avait soupçonné le colonel du Paty de Clam, qui n’était à ce moment que commandant, d’être l'auteur ou l’inspirateur de ces lettres : il fit une démarche auprès du préfet de police. M. Lozé, qui lui répondit, si on m’a bien rapporté sa réponse : « C’est du Paty ! »

M. le Président. — Mais vous ne le savez pas par vous même ; c’est un renseignement de seconde main.

Me Labori. — Mais la suite est intéressante, continuez...

M. Leblois. — Là-dessus, le comte de Comminges est allé trouver le général Davoust et l’a prié d’insister pour mettre un