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les mille nuits et une nuit

le remercia et dit : « Demain j’irai librement avec eux vaquer à mes occupations. » Là-dessus, il se mit à manger et avala tout le fourrage et même il lécha le boisseau avec la langue.

Tout cela ! et leur maître écoutait leurs paroles.

Lorsque parut le jour, le commerçant sortit avec son épouse vers l’habitation des bœufs et des vaches et tous deux s’assirent. Alors le conducteur vint, et prit le bœuf et sortit. À la vue de son maître, le bœuf se mit à agiter la queue, à péter avec bruit et à galoper follement en tous sens. Alors le commerçant fut pris d’un tel rire qu’il se renversa sur le derrière. Alors son épouse lui dit : « De quelle chose ris-tu ? » Il lui dit « D’une chose que j’ai vue et entendue, et que je ne puis divulguer sans mourir. » Elle lui dit : « Il faut absolument que tu me la racontes et que tu me dises la raison de ton rire, même si tu devais en mourir ! » Il lui dit : « Je ne puis te divulguer cela à cause de ma peur de la mort. » Elle lui dit : « Mais alors tu ne ris que de moi ! » Puis elle ne cessa de se quereller avec lui et de le harceler de paroles avec opiniâtreté, tant, qu’à la fin il fut dans une grande perplexité. Alors il fit venir ses enfants en sa présence, et envoya mander le kadi[1] et les témoins. Puis il voulut faire son testament avant de révéler le secret à sa femme et de mourir : car il aimait sa femme d’un amour considérable, vu qu’elle était la fille de son oncle paternel et la mère des enfants, et qu’il avait déjà vécu avec elle cent vingt années de son âge. De plus, il envoya quérir tous les parents de sa femme et les habitants du

  1. Le juge.