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les mille nuits et une nuit

ou bien aimez-vous mieux partir avec moi ? » Et elles me répondirent : « Nous partirons avec toi, car nous ne pourrons jamais supporter ton absence ! » Alors je les pris avec moi et nous partîmes.

Mais, avant mon départ, j’avais pris soin de diviser mon argent en deux parties : j’en pris avec moi la moitié, et je cachai la seconde moitié, en me disant : « Il est possible qu’il arrive malheur au navire et que nous ayons la vie sauve. Dans ce cas, à notre retour, si nous revenons jamais, nous trouverons là quelque chose qui nous sera utile. »

Nous ne cessâmes de voyager jour et nuit ; mais, par malheur, le capitaine perdit la route. Le courant nous entraîna vers la mer extérieure, et nous entrâmes dans une mer toute autre que celle vers laquelle nous nous dirigions. Et un vent très fort nous poussait, qui ne cessa de dix jours. Alors, dans le lointain, nous aperçûmes vaguement une ville, et nous demandâmes au capitaine : « Quel est le nom de cette ville sur laquelle nous nous dirigeons ? » Il répondit : « Par Allah ! je ne sais point. Je ne l’ai jamais vue, et de ma vie je ne suis entré dans cette mer. Mais enfin, l’important, c’est que nous sommes heureusement hors de danger. Aussi il ne vous reste plus qu’à entrer dans cette ville, et à étaler vos marchandises. Et si vous pouvez les vendre, je vous conseille de les vendre. »

Une heure après, il revint vers nous et nous dit : « Hâtez-vous de sortir vers la ville, et de voir les merveilles d’Allah dans sa création ! Et invoquez son saint nom, pour qu’il vous garde des malheurs ! »