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histoire du portefaix…
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ses richesses et la quantité de ses trésors ; et sa réputation s’est étendue dans toutes les contrées, par les caravanes qu’il envoyait au loin vendre les pierreries aux rois et aux émirs de la terre. À ma naissance sur le tard de sa vie, mon père fut avisé, par les maîtres de la divination, que ce fils devait mourir avant son père et sa mère ; et mon père, ce jour-là, malgré la joie de ma naissance et la félicité de ma mère, qui m’avait mis au monde après les neuf mois du terme par la volonté d’Allah, fut dans un chagrin considérable, surtout quand les savants, qui avaient lu mon sort dans les astres, lui eurent dit : « Ce fils sera tué par un roi, fils d’un roi nommé Kassib, et cela quarante jours après que ce roi aura jeté dans la mer le cavalier de cuivre de la montagne magnétique ! » Et mon père, le joaillier, fut dans l’affliction. Mais il prit soin de moi, et m’éleva avec beaucoup d’attention jusqu’à ce que j’eusse atteint quinze ans d’âge. Et c’est alors que mon père apprit que le cavalier avait été jeté à la mer, et il se mit à pleurer et à s’affliger tant, et ma mère avec lui, qu’il changea de teint, maigrit de corps et fut tel qu’un très vieux homme cassé par les ans et les malheurs. C’est alors qu’il m’amena dans cette demeure sous terre, dans cette île où, depuis ma naissance, il avait fait travailler les hommes, pour me soustraire aux recherches du roi qui devait me tuer à l’âge de quinze ans, après avoir renversé le cavalier de cuivre. Et mon père et moi nous fûmes certains que le fils de Kassib ne pourrait pas venir me trouver dans cette île inconnue. Et telle est la cause de mon séjour en cet endroit. »