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histoire du portefaix…
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moi, je le remerciai pour sa bonté, j’entrai dans la boutique et m’assis dans mon coin ; et je me mis à penser à ce qui m’était arrivé, et à me blâmer moi-même pour le coup de pied que j’avais donné à la coupole. Tout à coup, mon bon ami le tailleur entra et me dit : « Il y a, à la porte de la boutique, une personne, une sorte de Persan, qui te demande et qui a avec lui ta hache et tes sandales. Il les avait portées chez tous les tailleurs de la rue en leur disant : « Je sortis à l’aube pour aller à la prière du matin à l’appel du muezzin, et je trouvai sur ma route ces objets-là sans arriver à savoir à qui ils pouvaient appartenir. Dites-moi donc, vous autres, quel en est le propriétaire ! » Alors les tailleurs de notre rue qui te connaissent, en voyant la hache et les sandales, surent qu’ils t’appartenaient et donnèrent avec empressement ton adresse à ce Persan. Et il est là, qui t’attend à la porte de la boutique. Sors donc, et remercie-le pour sa peine, et prends ta hache et tes sandales. » Mais moi, à ces paroles, je sentis mon teint jaunir et tout mon corps s’affaisser de terreur. Et, pendant que j’étais dans cette prostration, tout d’un coup, la terre, devant mon coin, s’entr’ouvrit, et le Persan en question en sortit. C’était l’éfrit ! Il avait, pendant ce temps-là, mis sa jeune femme à la torture, et quelle torture ! Mais elle ne lui avait rien avoué. Alors il avait pris la hache et les sandales, et lui avait dit : « Je vais te prouver que je suis toujours Georgirus, de la postérité d’Eblis ! Et tu verras si je puis ou non t’amener ici le propriétaire de cette hache et de ces sandales ! »