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ſcence, ont porté le trouble dans les cœurs & fait éclore des folies deſtructives pour eux.

Comment l’eſprit-humain, infeſté par des phantômes effrayants & guidé par des hommes intéreſſés à perpétuer ſon ignorance & ſes craintes, eût-il fait des progrès ? On força l’homme de végéter dans ſa stupidité primitive ; on ne l’entretint que des puiſſances invincibles deſquelles ſont ſort étoit ſuppoſé dépendre. Uniquement occupé de ſes allarmes & de ſes rêveries inintelligibles, il fut toujours à la merci de ſes Prêtres, qui ſe réſerverent le droit de penſer pour lui & de régler ſa conduite.

Ainsi l’homme fut, & demeura toujours un enfant ſans expérience, un eſclave ſans courage, un ſtupide qui craignit de raiſonner, & qui ne ſçut jamais ſe tirer du labyrinthe où l’on avoit égaré ſes ancêtres ; il ſe crut forcé de gémir ſous le joug de ſes Dieux qu’il ne connut que par les récits fabuleux de leurs Ministres ; ceux-ci, après l’avoir garotté par les liens de l’opinion , ſont demeurés ſes Maîtres, ou bien, l’ont livré ſans défenſe au pouvoir abſolu des Tyrans, non moins terribles que les Dieux, dont ils furent les repréſentants ſur la terre.

Ecraſés ſous le double joug de la puiſſance spirituelle & temporelle, les peuples furent dans l’impoſſibilité de s’inſtruire & de travailler à leur bonheur. Ainſi que la Religion, la Politique & la Morale devinrent des ſanctuaires dans leſquels il ne fut point permis aux